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Les Indes galantes
Le Prologue de l’opéra-ballet Les Indes Galantes s’ouvre sur la déesse Hébé invitant de jeunes gens à célébrer l’Amour. Ces derniers sont cependant enrôlés par Bellone (une allégorie de la guerre) et désertent les lieux. Cette antithèse de l’amour et de la violence qu’énonce le prologue des Indes Galantes se développe ensuite au cours de quatre « entrées », dont les intrigues se déroulent successivement en Turquie, au Pérou, en Perse et chez les Indiens d’Amérique. La trame narrative des Indes Galantes, où abondent cataclysmes, naufrages et étonnants concours de circonstances, met ainsi en scène plusieurs conflits amoureux sur fond de rapports de domination : rapports de force entre conquistadors catholiques et autochtones païens, entre colons et « sauvages » ou entre hommes et femmes au sein d’un sérail, par exemple. Cette œuvre de Rameau tangue donc entre un exotisme de pacotille propre à divertir, et des questionnements éthiques et politiques emblématiques de la philosophie du XVIIIe siècle.
Sidi Larbi Cherkaoui s’empare de ces Indes Galantes en transposant les enjeux de l’opéra dans le monde d’aujourd’hui, où la mondialisation a transformé les notions d’exotisme et d’altérité. La proposition artistique de Sidi Larbi Cherkaoui pour Les Indes Galantes met en avant l’arrière plan de l’œuvre, le contexte militaire provoqué par Bellone, ainsi que ses conséquences, notamment en matière d’immigration — un sujet auparavant abordé par le chorégraphe dans La Zon-Mai ou Babel(words), entre autres. Les personnages de l’opéra de Rameau se détachent de cet arrière plan conflictuel, comme s’ils émergeaient d’un flux qui les dépasse. Dès lors, il s’agit, pour eux, d’en devenir des acteurs afin d’en infléchir le cours.
Dix chanteurs et dix danseurs d’origines multiples, le chef d’orchestre spécialiste du répertoire baroque Ivor Bolton, la scénographe Anna Viebrock et la costumière Greta Goiris accompagnent Sidi Larbi Cherkaoui dans cette aventure.